À l’été 1914, tout se conjugue pour faire de Louis Boulard un homme heureux sur tous les plans. Le cursus universitaire est sans faille. Après un doctorat soutenu à la faculté de droit de Paris en 1902, récompensé par un prix de thèse, il s’inscrit au barreau, tout en assurant des conférences dans ladite faculté. En 1907, il est nommé à Lille en suppléance du professeur André Giffard, envoyé en mission, et assure ses enseignements d’histoire du droit. D’emblée, Boulard s’impose comme un excellent pédagogue. En témoigne l’appréciation particulièrement élogieuse que porte le doyen Pilon, dont l’indulgence n’est pas la principale vertu, à l’issue de cette première année à Lille. Soulignant son érudition et son dévouement, il lui prédit un avenir brillant : « M. Boulard sera un professeurpour lire la suite…
Author: Des facultés sur le front du droit
Gustave Chéneaux, « rien que du bien à dire de lui »
Le 29 avril 1920, face à une assemblée d’étudiants et de professeurs de la faculté de droit de Bordeaux, le doyen Léon Duguit prononce un discours dans lequel il rend hommage et pleure la disparition de l’un de ses collègues, le professeur de droit civil Gustave Chéneaux. Publié par la suite, ce discours suscite chez le lecteur des sentiments contrastés, tant la volonté de justifier la boucherie qu’a été cette guerre transpire dans la parole de l’éminent juriste. Cela étant, les propos de Duguit sont empreints d’une véritable tendresse et d’une tristesse palpable lorsqu’ils s’attardent sur la personnalité de cet enseignant, « tué à l’ennemi » le 29 avril 1915 près de Verdun. C’est d’abord la simplicité du disparu, son opiniâtreté et sa force de travail quepour lire la suite…
Les mobilisations professorales : le cas de la Faculté de droit de Lyon
Dans un conflit militaire, les universités sont susceptibles de procurer à l’État dont elles dépendent des ressources de natures diverses. La première d’entre elles est de nature humaine, au travers des personnes de leurs étudiants et, celles, moins nombreuses, de leurs professeurs mobilisés militairement. Dans un pareil contexte, les universités sont encore susceptibles d’apporter des ressources scientifiques, dont les applications militaires peuvent parfois s’avérer déterminantes. Enfin, elles peuvent procurer des ressources symboliques non négligeables. La production intellectuelle, par le simple fait qu’elle persiste dans l’adversité, atteste la vigueur du pays belligérant ainsi que sa capacité de résistance à l’inévitable désorganisation engendrée par le conflit. Mais cette production intellectuelle peut encore, à sa manière, contribuer à l’effort de guerre en travaillant à consolider la résolution belliqueusepour lire la suite…
La mission américaine du professeur Geouffre de La Pradelle (1914-1917)
L’acte de violation de la neutralité des États belges et luxembourgeois, commis par l’Allemagne dans les premiers jours du mois d’août 1914, a puissamment contribué à façonner une représentation du conflit dans laquelle la France et ses alliés ont eu beau jeu de se poser en vertueux champions du droit menacé par la barbarie germanique. Mais il a eu, aussi, pour effet paradoxal de placer les pays neutres au cœur de cet affrontement où ils refusaient d’entrer militairement. Car l’attitude désinvolte de l’Allemagne à l’égard de deux États bénéficiant d’un pareil statut, reconnu et protégé par des traités internationaux qu’elle-même avait ratifiés, le mépris affiché à l’égard desdits traités, ramenés au rang de « chiffons de papier » par le chancelier Bethmann-Hollweg, ne constituaient pas seulement unepour lire la suite…
Alexandre Mérignhac (1857-1927), une voix de la paix internationale
Officier de la Légion d’honneur, officier de l’Instruction publique, chevalier du Mérite agricole, commandeur de l’ordre d’Isabelle la Catholique, chevalier de la couronne d’Italie ; les décorations sont nombreuses mais le regard paraît mélancolique. À qui s’attarde devant le tableau le représentant, Alexandre Mérignhac, de nos jours bien oublié, offre une image contrastée car, en son temps honoré tant nationalement qu’internationalement, il a en revanche connu bien des désillusions dans son constant combat, sinon en faveur d’une totale éradication de la guerre, du moins au profit de sa codification et de l’instauration d’instances internationales de maintien de la paix. Né à Toulouse le 21 janvier 1857, ce fils d’avocat soutient à l’âge de 20 ans sa thèse de doctorat consacrée au Droit de suite par hypothèque en droit romainpour lire la suite…
Louis Renault : légitimer le droit international en France
Ce fils de libraire né en 1843 fait son droit à Paris et sort diplômé en 1861. Professeur de droit romain et de droit commercial à l’université de Dijon (ce dernier domaine étant aussi celui de son collègue Charles Lyon-Caen, également né en 1843, et avec lequel il co-rédigera un livre), il supplée Charles Giraud pour le cours de droit des gens à la faculté de Paris, avant de lui succéder, en 1888. Il enseigne aussi à la nouvelle École libre des sciences politiques, qui fut un vivier pour les internationalistes français. Jurisconsulte au Quai d’Orsay dès 1890, représentant de la France aux conférences de la paix de La Haye de 1899 et 1907, membre de l’Institut de droit international depuis 1882, son aura granditpour lire la suite…
Portraits de professeurs
1 juillet 20184 novembre 2021 Des facultés sur le front du droitPortraits de professeurs Louis Renault : légitimer le droit international en France Ce fils de libraire né en 1843 fait son droit à Paris et sort diplômé en 1861. Professeur de droit romain et de droit commercial à l’université de Dijon (ce dernier domaine étant aussi celui de son collègue Charles Lyon-Caen, également né en 1843, et avec lequel il co-rédigera un livre), il supplée Charles Giraud pour le cours de droit des gens à la faculté de Paris, avant de lui succéder, en 1888. Il enseigne aussi à la nouvelle École libre des sciences politiques, qui fut un vivier pour les internationalistes français. Jurisconsulte au Quai d’Orsay dès 1890, représentant de la France auxpour lire la suite…
Le « Journal de guerre » de Paul Demeur
Le « Journal de guerre » de Paul Demeur n’en est pas vraiment un. Avocat à la Cour de cassation, Paul Demeur est sollicité par le comité de rédaction du Journal des Tribunaux, le plus important périodique juridique de Belgique, en 1964. Paul Demeur est alors une personnalité en vue dans le milieu des juristes belges de la seconde moitié du xxe siècle, à la fois comme avocat à la Cour de cassation mais également comme professeur à l’université catholique de Louvain. Cinquante ans après l’entrée en guerre, le comité de rédaction trouve « convenable d’évoquer […] la mémoire des juristes, magistrats et avocats en exercice ou en herbe, qui ne sont pas, à l’époque, restés insensibles à l’appel du pays et dont les simples et purs exemples nourrissentpour lire la suite…
Charles Le Coq de Kerland père et fils : deux générations de juristes mobilisées, depuis l’amphithéâtre jusque dans les airs
La déclaration de la guerre le 1er août 1914 déclenche la mobilisation générale. Le nombre d’hommes âgés de 20 à 38 ans appelés à rejoindre les rangs de l’armée s’élève à plus de 3 800 000. Toutefois l’ampleur de la contribution des Français au conflit ne se résume pas à la gourmandise de l’institution militaire. En effet l’ensemble de la société française se mobilise dans l’Union sacrée. Pendant plus de quatre ans, ce sont en effet les membres de familles entières, combattants et civils, qui voient leurs activités guidées par l’espoir de la victoire. Ceci en réponse aux sollicitations du Gouvernement, qui oriente tous les secteurs de la vie sociale vers le conflit et met en place une propagande de guerre, mais aussi un appelpour lire la suite…
Les femmes étudiantes et le milieu associatif étudiant à Bordeaux
Les universités françaises restent peu accessibles aux femmes. La faculté de Bordeaux créée en 1441, puis (re)créée en 1870 après sa suppression en 1793 illustre l’absence de mixité. L’étude de L’université de Bordeaux dans la Grande Guerre est un bon exemple pour dépeindre l’entrée des femmes – ces pionnières – dans l’enseignement supérieur français et leurs engagements en tant que membres actifs d’associations étudiantes. En France, Emma Chenu et Julie-Victoire Daubié sont les deux premières étudiantes. Respectivement inscrites pour la première en licence de sciences et mathématiques en 1867, pour la seconde en licence de lettres en 1871 (première française à être reçue bachelière à la faculté de Lyon en 1861). En droit il faut attendre 1884 pour que deux femmes (l’une russe et l’autrepour lire la suite…